La faune et la flore de la Montagne de Colanhan

L’exploitation artisanale et familiale du schiste ardoisier a été effectuée dans le passé sur le sommet de la Montagne de Colanhan. Pour cette raison, on retrouve aujourd’hui de nombreuses fosses d’extraction et les tas de déblais sur ce site.

Ce milieu semi-naturel a été lentement recolonisé par une végétation têtue, habitée par une faune plurielle, discrète, craintive ou insaisissable. Même si certaines parcelles ont aussi été plantées d’épicéas pour être rentables aux yeux des hommes, l’intérêt majeur du site est sa nature : sa flore et sa faune.

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La faune à Colanhan

Punaise grise (Elasmucha grisea)
Punaise grise (Elasmucha grisea) © Geneviève et Éric Lebrun-Moréas

Insectes

L’apodère du noisetier (Apoderus coryli), le cigarier du bouleau (Deporaus betulae), le cigarier du chêne (Attelabus nitens) signalent leur présence par un « cigare » dans lequel la femelle pond ses œufs et qu’elle construit à partir d’une feuille, typiquement et respectivement, de noisetier (Corylus avellana), de bouleau (Betula pendula) ou de chêne (Quercus petraea ou Quercus robur).

En été, la face inférieure d’une feuille de bouleau abrite parfois la punaise grise (Elasmucha grisea) prenant soin de sa progéniture. Les pentatomes des genêts (Piezodorus lituratus), adultes et juvéniles, se bousculent sur les genêts à balais (Cytisus scoparius) pendant que la cicindèle champêtre (Cicindela campestris) patrouille nerveusement sur le chemin. En bordure de la mégaphorbiaie, des armées de larves de la galéruque de l’aulne (Agelastica alni) réduisent en dentelle les feuilles des aulnes glutineux (Alnus glutinosa).

Neuroterus numismalis et Neuroterus quercusbaccarum
Neuroterus numismalis et Neuroterus quercusbaccarum © Geneviève et Éric Lebrun-Moréas

Cécidies

Le chêne pédonculé (Quercus robur) abrite complaisamment de discrets arthropodes à la face inférieure de ses feuilles, sur ses chatons ou sur ses bourgeons dans des formations végétales spécifiques appelées cécidies, souvent communes (Neuroterus albipes, Neuroterus numismalis, Neuroterus quercusbaccarum), très discrètes (Trioza remota) ou remarquables (Andricus foecundatrix, Andricus kollari, Neuroterus longiventris).

Les feuilles du bouleau verruqueux (Betula pendula) cachent parfois Massalongia ruber ou Eriophyes leionotus. Le dryoptéris des chartreux (Dryopteris carthusiana) et le dryoptéris dilaté (Dryopteris dilatata) ont parfois le sommet de leur fronde enroulée-crispée par Chirosia betuleti. La nervure principale ou le pétiole des feuilles de la petite oseille (Rumex acetosella), en nombre sur les déblais exposés, est parfois occupé par le petit curculionoïde Apion rubens.

Mammifères

Latrines à l’écart des chemins et empreintes dans la boue des ornières trahissent les passages du blaireau (Meles meles). Côté ouest, dans le cran creusé par la Lienne, en contrebas de la petite carrière, le castor d’Europe (Castor fiber) a installé son barrage, sa hutte et taillé plus en aval quelques « crayons », parfois gros comme un arbre.

Oiseaux

Au printemps, cette étroite vallée entend aussi résonner le « hou » répétitif du hibou grand-duc (Bubo bubo), parfois même en plein jour. De grosses pelotes de réjection attestent de ses visites sur Colanhan. Les sous-bois et les taillis résonnent aussi des cris prudents du pic épeiche (Dendrocopos major), inquiétés de la sittelle torchepot (Sitta europaea), rauques du geai des chênes (Garrulus glandarius) ou moqueurs du pic vert (Picus viridis).

Le ciel aussi s’anime quand le pic noir (Dryocopus martius) passe hâtivement à coups de sifflet ; quand le milan royal (Milvus milvus) patrouille au-dessus des pentes abruptes boisées ; quand un groupe de grands corbeaux (Corvus corax) se chamaillent bruyamment ou se choisissent en automne dans des acrobaties synchronisées pour déjà préparer le printemps ; quand une cigogne noire (Ciconia nigra) passe parfois, silencieuse et timide, pour prendre ensuite un peu de hauteur. Dans un départ précipité, la discrète bécasse des bois (Scolopax rusticola) y laisse parfois quelques plumes sur le chemin.

La flore à Colanhan

Oligotrichum hercynicum
Oligotrichum hercynicum © Geneviève et Éric Lebrun-Moréas

Bryophytes et hépatiques

Les murs des fosses ombragées et humides sont couverts par :

  • Jungermannie blanchâtre (Diplophyllum albicans) 
  • Scapanie du bois (Scapania nemorea)
  • Jongermanne grasse (Aneurapinguis) y prend possession du bord des éventuelles petites cuvettes remplies d’eau en leur fond.

Les fosses qui retiennent plus d’eau permettent l’installation de sphaignes comme :

  • Sphaigne trompeuse (Sphagnum fallax)
  • Sphaigne frangée (Sphagnum fimbriatum)
  • Sphaigne squarreuse (Sphagnum squarrosum)

Dans les petits ruisseaux on trouve :

  • Fontinale majeure (Fontinalis antipyretica)
  • Fontinalis squamosa
  • Platyhypnidium riparioides

Plus loin, Pogonatum aloides grimpe un talus en bordure d’un chemin. Là, la lépidozie rampante (Lepidozia reptans) et la lophocolée à deux dents (Lophocolea bidentata) sont ensemble en repos sur une souche pourrissante.

Ptilidie des rochers (Ptilidium ciliare) trouve son salut dans l’assaut d’une dalle pentue ou du bas d’un tronc. Le cératodon pourpré (Ceratodon purpureus) dresse ses soies rouges sur les espaces herbeux exposés en contre-haut des fosses. Le rare polytric à feuilles droites (Oligotrichum hercynicum) dit aussi qu’il est chez lui. Enfin, quelques arbres portent fièrement en écusson frullaine (Frullania dilatata) ou radule plate (Radula complanata).

Lichens

Les versants de Colanhan portent des taillis de bouleaux obstinés et de chênes torturés et bas-branchus, riches en lichens épiphytes :

  • Évernie mousse du chêne (Evernia prunastri)
  • Flavoparmélie ridée (Flavoparmelia caperata)
  • Platismatie glauque (Platismatia glauca)
  • Pseudevernia furfuracea
  • Ramalina farinacea 
  • Usnée pouilleuse (Usnea subfloridana)
  • l’emblématique usne filipendule (Usnea filipendula)

Le discret Hypocenomyce scalaris s’accroche à l’écorce du pin sylvestre (Pinus sylvestris) et le rare Cetraria sepincola semble vouloir résister encore sur les branchettes des bouleaux.

Les creux des souches ou des chandelles qui y sont égarées dissimulent parfois les minuscules « clous » de Chaenotheca cf brunneola ou de la chénothèque sulfureuse (Chaenotheca furfuracea)Trapeliopsis pseudogranulosa et la micarée verte (Micarea prasina) semblent vouloir y conquérir le bois pourrissant au sol.

Les parois presque verticales de certaines fosses ou de la petite carrière exposent des lichens saxicoles comme :

  • Chrysotriche sulfureuse (Chrysothrix chlorina) 
  • Diploschiste rocailleux (Diploschistes scruposus)
  • Psilolche sulfureuse (Psilolechia lucida)

Sur les tas de déblais on retrouve des régiments serrés de :

  • Cladonia portentosa
  • Cladonia squamosa 
  • Cladonia uncialis 

De gros blocs de schiste y sont garnis de :

  • Rhizocarpe géographique (Rhizocarpon geographicum)
  • Stéréocaule dactylique (Stereocaulon dactylophyllum)
  • Xanthoparmlie poivre (Xanthoparmelia conspersa)

De plus petits fragments à l’allure d’ardoise déchue paraissent piquetés de Lecanora polytropa.

Pied-d’oiseau délicat (Ornithopus perpusillus)
Pied-d’oiseau délicat (Ornithopus perpusillus) © Geneviève et Éric Lebrun-Moréas

Plantes supérieures

Les sous-bois des taillis de bouleaux verruqueux (Betula pendula) et de chênes pédonculés (Quercus robur) ou sessiles (Quercus petraea) sont dominés par la canche flexueuse (Deschampsia flexuosa) et la myrtille commune (Vaccinium myrtillus) avec, ici et là, le mélampyre des prés (Melampyrum pratense), la germandrée scorodoine (Teucrium scorodonia) et l’airelle rouge (Vaccinium vitis-idaea). Quelques alouchiers (Sorbus aria) s’y sont aussi perdus. La myrtille de loup (Vaccinium uliginosum) a souffert des canicules récentes.

Les éboulis siliceux accueillent :

  • la callune (Calluna vulgaris)
  • la digitale pourpre (Digitalis purpurea)
  • le gaillet du Harz (Galium saxatile)
  • le galéopsis douteux (Galeopsissegetum)
  • le sureau à grappes (Sambucus racemosa)

On retrouve aux bords de chemin :

  • Le millepertuis couché (Hypericum humifusum)
  • le pied-d’oiseau délicat (Ornithopus perpusillus)
  • et la spergulaire rouge (Spergularia rubra)

Dans la mégaphorbiaie rivulaire installée dans le cran de la Lienne :

  • l’angélique sauvage (Angelica sylvestris)
  • la bistorte (Bistorta officinalis)
  • la salicaire commune (Lythrum salicaria)
  • la reine-des-prés (Filipendula ulmaria)
  • la valériane officinale (Valeriana repens)

Champignons

La fonge n’est évidemment pas absente de ce milieu mêlé de conifères et feuillus au sol acide :

  • l’amanite rougissante (Amanita rubescens)
  • l’amanite fauve (Amanita fulva)
  • l’amanite safran (Amanita crocea)
  • l’amanite épaisse (Amanita excelsa var. spissa)
  • la russule noircissante (Russula nigricans)
  • le théléphore terrestre (Thelephora terrestris)

Sous chêne le lactaire tranquille (Lactarius quietus) et, sous bouleau, le lactaire chiffonné (Lactarius tabidus) assistent leur hôte respectif.

Sur une souche, une chandelle ou un tas de conifères ou de feuillus :

  • le polypore marginé (Fomitopsis pinicola),
  • le tramète rouge cinabre (Pycnoporus cinnabarinus),
  • le lenzite des clôtures (Gloeophyllum sepiarium)

Artomyces pyxidatus joue l’équilibriste sur un bois mort. En bord de chemin herbeux, la bolbitie jaune d’œuf (Bolbitius titubans) compte les pas des promeneurs. Aecidium strobilinum s’est installé confortablement entre les écailles d’un cône d’épicéa. Enfin, la fausse-chanterelle des bruyères (Cantharellula umbonata) est fière de son titre d’espèce patrimoniale des landes à callune.

Cet article est issu des Carnets des Espaces Naturels N°11.

Voir les caractéristiques générales de la réserve naturelle de Colanhan

 

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