Un peu partout dans le monde, la mythologie présente l’abeille comme un symbole de vertus telles que la protection de la nature, l’industrie, la prospérité, la propreté, la fertilité, le cycle de la vie, mais aussi la connexion spirituelle au divin, et même l’érotisme !
Chez les Grecs antiques, les abeilles sont étroitement associées à la déesse Artémis, souvent représentée comme la protectrice des animaux sauvages et de l’environnement naturel. Les Melissae, nymphes associées aux abeilles, la servent et sont censées posséder le don de prophétie. D’ailleurs, les prêtresses d’Artémis et de Déméter sont appelées « Melissae », ce qui souligne le lien sacré entre les abeilles et le divin féminin.
Pour les Égyptiens, les abeilles sont considérées comme les larmes du dieu soleil Râ. Selon la légende, lorsque Râ pleure, ses larmes se transforment en abeilles en touchant le sol. Ce mythe illustre le fait que les abeilles sont considérées comme un pont entre le terrestre et le céleste, un symbole repris dans divers hiéroglyphes et insignes royaux.
Chez les Mayas, plusieurs dieux prennent l’apparence de la mélipone, une petite abeille d’Amérique centrale aux yeux bleus qui ne pique pas et produit un excellent miel.
Dans la mythologie hindoue, les abeilles sont des assistantes divines de la vie terrestre de l’homme, contribuant à maintenir l’harmonie de toute la nature. Les abeilles sont également de puissants symboles de vie, de voyage, de transformation de l’âme et de renaissance. Elles symbolisent aussi le printemps et l’amour et sont associées à l’érotisme.
Chez les Celtes, amateurs d’un mélange d’eau et de miel que l’on appellera plus tard « hydromel », l’abeille est une messagère capable de voyager entre le monde réel et le monde spirituel. Nantosuelta, déesse de la nature, de la terre, du feu et de la fertilité est souvent représentée avec une ruche, production humaine qui dépend de l’abondance de la nature.
Dans l’allégorie chrétienne, elle représente souvent la Vierge Marie. Dans une obscure histoire de rédemption charnelle, des abeilles entrent et sortent de la bouche de Sainte-Rita lorsqu’elle est bébé. C’est la sainte des dards et des épines. Sobriété, abstinence de viande et de rapports sexuels, labeur, propreté, silence, sens du bien commun, discipline et sociabilité sont quelques caractères attribués à cet insecte. Par conséquent, il n’est pas difficile de comprendre pourquoi l’abeille fut la source d’inspiration d’un idéal humain patriarcal étroitement lié aux vierges, aux épouses ainsi qu’aux saintes.
Les anciens ne s’y sont pas trompés, les abeilles ont, de mémoire d’homme, toujours été perçues comme un élément d’harmonie dans la nature, mais aussi entre la nature et l’humain. Toutes les religions, monothéistes ou non, sont allées butiner dans la ruche du sacré ! Elles sont heureusement aujourd’hui surtout reconnues pour leur rôle crucial dans la pollinisation des plantes et la préservation de la biodiversité.
Mais que savons-nous au juste de ces hyménoptères ? Si nous connaissons tous l’abeille mellifère (et quelques cousines tropicales), qui nous offre les précieux produits de la ruche et l’inspiration mythologique évoquée plus haut, nous savons moins que notre territoire abrite plusieurs centaines d’espèces d’abeilles sauvages. Certaines vivent plus ou moins socialement, d’autres de manière solitaire. Toutes n’offrent pas un visage aussi angélique que celui suggéré dans les mythes et certaines peuvent se montrer très opportunistes à l’instar du coucou s’installant tragiquement dans le nid d’une autre espèce.
Une grande diversité extrêmement utile, mais dont certaines représentantes doivent affronter de nombreuses menaces comme la perte de leur habitat, la raréfaction de leur nourriture, les pesticides ou encore les modifications du climat. Il est donc indispensable de favoriser les lieux d’accueil propices pour ces insectes en leur proposant de belles étendues fleuries, aux champs, en ville et au jardin ! Et ce sera également tout bénéfice pour les bourdons, les papillons, les syrphes et l’ensemble des butineurs de nos contrées.
Depuis peu, la Wallonie vient de se doter d’un nouveau gouvernement. Nous lui souhaitons un bon accueil tout en espérant que ses représentant.e.s seront, plus que jamais, sensibles à la nécessité impérieuse de préserver et favoriser la biodiversité. L’inscription d’un plan pollinisation dans la Déclaration de Politique Régionale 2024-2029 est un point positif. Que ce soit en protégeant les espaces naturels ou en développant les réseaux écologiques, il en va de notre propre avenir ainsi que de celui des générations futures.
S’il y a bien un espace naturel emblématique pour Ardenne & Gaume, c’est la Réserve naturelle de Furfooz. Nous pouvons dès lors vous annoncer que les travaux de revalorisation du site ont débuté ! À la clé, un nouveau bâtiment d’accueil et une belle scénographie didactique de la réserve pour encore mieux vous y accueillir et vous en faire découvrir les richesses naturelles, géologiques et historiques !
Cet article est l’édito des Carnets des Espaces Naturels N°21.
Crédit photo : « Abeille buvant du nectar » – Art populaire Madhubani, pratiqué dans la région de Mithila en Inde (2018) – Indian Institute of Science